Société

jeudi, 13 juin 2013 05:01

La drépanocytose, tous concernés !

Pendant quelques semaines Outremerlemag a ouvert ses colonnes pour soutenir Jenny Hippocrate qui milite sans relâche avec son association APIPD pour faire avancer la recherche afin d’éradiquer cette maladie appelée DREPANOCYTOSE ;

Elle a crié sa douleur dans Outremerlemag, Nous sommes admiratifs devant son acharnement  pour faire reculer la maladie…

Du 12 au 19 juin la semaine de lutte contre la drépanocytose se déroule avec un temps fort au Zénith grâce aux artistes engagés pour la cause et aux partenaires qui se mobilisent petit à petit….DREPACTION est donc un concert de solidarité au profit de la recherche.

C’est déjà bien ,mais il faut aller plus loin. Il faut élargir la mobilisation afin que l’engouement populaire oblige les pouvoirs à consacrer davantage de moyens pour lutter efficacement contre cette pathologie.

Interview entre Outremerlemag et Jenny Hippocrate.

Depuis quelques semaines nos lecteurs découvrent la maladie appelée DREPANOCYTOSE au travers vos écrits, récits et poèmes qui sont autant de cris d’espoir et de désespoir…

Expliquez nous ce qui vous tient ?

Cri de désespoir ? Pas vraiment, de déception, oui, je suis déçue de voir que malgré toute l’énergie que nous déployons pour non seulement sensibiliser la population à la drépanocytose, mais aussi pour que les décideurs prennent conscience de ce fléau qui décime des familles, presque rien n’est fait pour soulager cette souffrance humaine. Ce qui me tient ? C’est la FOI, celle que j’ai en DIEU, mais aussi celle que j’ai  en nous, mon équipe et moi-même, en ce que nous faisons à l’association. Nous sommes une belle équipe et notre crédo, vaincre la drépanocytose et j’espère que cela se fera avec moi !

Aussi, mon fils Taylor de par son courage, son humilité, me tient aussi  debout. Il n’a pas demandé à être là, de même que tous les autres malades, de ce fait, je dois me battre pour lui et pour tous les drépanocytaires qui ont fait de moi leur «  maman ». La vie mérite d’être vécue, ils ont le droit, même à une once de bonheur, à un sourire sur leur visage figé par la douleur, ils ont le droit d’être considéré comme des êtres humains, ils le sont, ce ne sont pas « des petits négros drogués à la morphine ». Ne me regardez pas avec ses yeux –là, oui, c’est comme cela que ce fut un temps, mon fils a été traité. Vous comprenez ma colère ? Il est temps que les gens arrêtent de dire que je suis exécrable. En France, très peu ont  subi ce que MOI, j’ai subi avec un enfant malade, en l’occurrence, drépanocytaire. Ma colère a laissé place aujourd’hui, non pas à la résignation, puisque je me rends compte que je me suis beaucoup battue contre les moulins à vent, mais à encore plus de détermination pour vaincre la maladie. Je vis avec la drépanocytose, je me couche avec la drépanocytose, je me réveille, quand j’ai un peu de temps pour dormir, avec la drépanocytose, ma vie est jonchée des dégâts de la drépanocytose, même si je ne m’appelle pas «  madame drépanocytose », cependant seule ou avec les autres, je dois vaincre la drépanocytose !  Cette immondice, cette bête féroce a fait trop de mal dans ma famille, heureusement que nous sommes soudés et c’est là notre force, celle qui nous permettra de mettre KO cette «  chose ». Je suis consciente que personne ne peut prétendre gagner seul un combat, c’est pour cela que je me contredis souvent en disant que je peux aller  loin toute seule, mais avec les autres je pourrai arriver à bon port : c’est-à-dire gagner ce combat pour la vie !

Dans votre dernier article publié dans nos colonnes vous nous dites que cela fait 100 ans que la maladie est identifiée … et toujours rien hier encore vous avez enterré un membre de votre famille atteint de drépanocytose …

Comment expliquez vous ce retard de la recherche à propos de cette maladie ?
Pensez vous que la recherche est égalitaire quelque soit la maladie ?

Pourquoi me posez une rhétorique ? Tout le monde a la réponse, il suffit d’ouvrir les yeux et de se déboucher les oreilles. Vous voulez que je vous réponde ? Oui, il y a une inégalité : la drépanocytose ne bénéficie pas de la même attention que les autres maladies génétiques, elle est discriminée, oubliée, négligée. La drépanocytose, ce n’est pas l’affaire des autres. Ceux qui pensent ne pas être concernés, ils se trompent, c’est l’affaire de tous, car nous sommes tous concernés. Vous savez, il y 21 ans, je n’avais pas de malades sous mon toit, je vivais une vie tranquille, heureusement que je n’avais pas fermé les yeux sur ce qui se passe dans le monde, puisque j’avais déjà embrassé des associations de lutte, contre par exemple, la faim, donc j’étais déjà nantie d’une force, ce qui m’a peut-être «  sauvé » de cette annonce diagnostique de la maladie de mon enfant par…téléphone !
La drépanocytose est la maladie génétique la plus répandue dans le monde c’est plus de 50 millions de malade et plus de 300 millions de personne concernées ? Où est l’erreur ?
Ne dit-on pas souvent et injustement d’ailleurs que c’est la maladie des noirs ? Sous-entendu, des pauvres, sous-entendu qu’il n’y a pas d’argent et on ne peut pas par exemple faire un médicament pour des gens qui ne pourront pas payer ! Tout est une question d’argent, de gros sous, donc les plus démunis restent les plus démunis même au niveau de la santé et nous sommes au 21eme  siècle et c’est ça cette France de l’EGALITE,  c’est une maxime galvaudée ! Je pense à une phrase que ma défunte mère disait souvent : chez les gros tout est toujours gros, chez les petits, tout est toujours petit. A méditer !
Cent ans ! Oui, ils ont découvert la maladie et  identifier l’hémoglobine anormale, il y a 50 ans, c’est « l’exemple de recherche » pour les maladies génétiques et on ne fait RIEN !
Pourtant tous les malades ne mourront pas et la population drépanocytaire va vieillir, des enfants drépanocytaires vont naitre, n’oublions pas que c’est une maladie génétique et qu’il y a plus de 150 000 porteurs dans notre pays, des porteurs sains qui ne sont pas malades, mais qui risque de transmettre la maladie à leur progéniture et très souvent qui s’ignorent porteurs.  Certains vont être bien embêtés plus tard.


Dans  notre pays, la France, on assiste à une véritable mobilisation contre la faim ?
Est ce que nos politiques sont hantés par le passé du peuple français qui a coupé le cou du roi de France parce qu’il avait faim ….

En d’autres mots, seules des opérations de force à grands fracas médiatiques permettraient de faire bouger les décideurs et les politiques en faveur de la recherche pour éradiquer ce fléau ?

Oh ! Je n’en sais rien, par rapport à cette « réparation », concernant le geste fait contre le roi de France, je ne suis pas dans la tête des gens, mais tout compte fait, si c’est le cas, pourquoi, n’y aurait-il pas réparation pour les drépanocytaires ? Hein ? Connaissez-vous l’histoire de cette maladie dans nos départements ? Celle du roi de France arrive bien aujourd’hui dans vos interrogations, madame, alors, je vais vous raconter la nôtre : on a vu apparaitre la drépanocytose dans nos petits pays par rapport à la traite négrière. Oui, ce sont les esclaves noirs déportés aux Antilles françaises et anglophones qui sont à la genèse de ce fléau. Avant eux, il n’y avait pas la drépanocytose chez nous ! Mes mots ne font pas facture de reproches, pas du tout, puisque sans ces esclaves, je ne serai pas là en train de vous parler, ce sont mes aïeux, d’accord ? Donc, pour revenir à ce que je vous disais, si certains sont hantés par la barbarie faite au roi de France et qu’ils apaisent leur conscience par  de grandes manifestations contre la faim, il est temps vraiment que ces même consciences s’éveillent et daignent enfin se pencher sur cette partie de « leur histoire ».
Je ne sais pas si les grands fracas médiatiques feront bouger les choses concernant la drépanocytose, peut-être que oui, je l’espère ; en tout cas, cela permettrai à la population d’être informée massivement. Il faut que tout le monde sache qu’il existe une maladie qui s’appelle, la DREPANOCYTOSE, qui tue beaucoup de personnes et ceux qui détiennent un tantinet, voire beaucoup de pouvoir ne font rien ! Cependant, je pense que si tout le monde, je dis bien tout le monde, toute culture confondue, toute situation sociale confondue s’y mettait, se tenait debout devant «  les mandarins », je pense qu’ils capituleraient. Commençons par vous, les journalistes, qu’attendez- vous pour dénoncer ce système, hein ? Cette position des 3 petits singes ne vous est pas inconfortable ?  Je ne dis rien, je n’entends rien, je ne vois rien ! Ne doit pas faire partie de l’éthique des journalistes. Surtout, madame, ne gommez pas cette phrase, je vous en prie.

Toute votre famille est impliquée  au quotidien dans la lutte contre la drépanocytose Samuel Mandy Alex,… tout en vivant normalement ( travail école…)

Considérez vous que vous  portez seule une cause nationale , j’ai même entendu certaines personnes vous appeler Madame Drépanocytose… ?

Ah, on revient sur madame «  drépanocytose ». J’aurais pu accepter ce qualificatif, mais je n’en veux pas ! je ne suis pas LA drépanocytose, mais la mère d’un jeune homme drépanocytaire et mon fils non plus n’est pas la drépanocytose : c’est une squatteuse qui vit dans son corps qui lui suce tout son sang et qui l’empêche d’avoir une vie normale, alors, s’il vous plait, je m’appelle Jenny Hippocrate Fixy et mon fils s’appelle Taylor, je ne m’adresse pas à vous, mais à ceux qui m’ont affublé de ce patronyme.
Quelqu’un  que je ne nommerai pas m’a dit un jour : Tu porteras sur tes frêles épaules, le désespoir et la haine de l’humanité. Une prédiction ? Un vœu ? Un désir ?  Je n’en sais rien ! Je sais seulement que c’est  peut-être une mission, une vocation, un sacerdoce, d’autant plus, que pour partir en guerre, il faut des armes sophistiquées, des satellites, moi, je n’avais rien de tout cela à part le cœur d’une mère rempli d’amour et peut-être un bâton invisible… de pèlerin…  Rassurez- vous, je ne suis pas seule, mon équipe APIPD veille au grain et est toujours parée au combat, nous sommes les guerriers de la vie. Ils ont fait de moi leur capitaine, Ô mes matelots de l’amour. Mon équipe est composée de 153 membres, je ne l’ai pas fait exprès : 153, c’est encore à méditer !

Qu’avez vous à dire à ceux qui nous dirigent ?
Arrêtez de faire comme Ponse Pilate, c’est-à-dire se laver les mains ! Souvent certains ministres ont joué aux pompiers. Je m’explique : Quand il y a une épidémie dans notre pays, comme par exemple, la dengue, le chikunguya, tout le monde accourt, pour faire « voir » qu’ils sont là. Baliverne ! Il existe des maladies chroniques qui tuent à petit feu, c’est là qu’on a besoin de ces fameux pompiers et ils n’en font rien, alors arrêtons les hypocrisies  agissez  bien pour nos concitoyens qui sont aussi des électeurs potentiels, beaucoup d’entre eux sont encore vivants. Faisons rapidement un calcul : 20 000 malades, plus de 150 000 porteurs sains en France, combien ça fait d’électeurs en comptabilisant, la famille (pères, mères, frères, sœurs, cousins, cousines, famille du conjoint etc.) ? Ça en fait des milliers de personnes, Heu… D’électeurs ! De toutes les  façons on estime à 3 millions d’électeurs le nombre de personnes atteintes de ce qu’on appelle maladies rares (toutes pathologies confondues).
La santé n’a presque jamais fait partie des grands plans des différents gouvernements, alors que s’il y a une chose qui es propre à toute la population, c’est bien la santé, pourquoi alors en faire abstraction ? On est tous des éventuels malades ! et avant de dépenser les fonds publics pour financer certaines manifestations privées, on devait commencer par faire ce qui est essentiel : sauver des vies !

Nous sommes à la veille de l’action forte de la semaine de sensibilisation  contre la drépanocytose  le concert DREPACTION qui mobilisent ce dimanche 16  tous les artistes engagés au Zénith  de 16 Heures.

Que dites- vous aux lecteurs d’outremerlemag pour vous rejoindre au Zénith… parce qu’après ce moment fort … la lutte continue…

Rien ! Vous êtes étonnée, n’est-ce pas ? Je vais me contredire alors, je leur dit de laisser parler leur cœur !
Je vais diviser la population en 4 groupes :
-Ceux qui vont être présents au Zenith de Paris ont tout compris, donc pas besoin de leur ajouter quoi que ce soit.
-Ceux qui ne peuvent pas venir pour X raison, ils habitent trop loin, ou ils sont malades ou autres, moi, je comprends.
-Ceux qui n’ont pas vraiment entendu l’appel  « au secours »des drépanocytaires ou le mien, parce que l’information n’est pas arrivée jusqu’à eux. Je comprends et ne leur dis rien, pas d’animosité en tout cas envers eux.
-Ceux qui ne font pas partie des 3 groupes précités, et qui de surcroit feignent ne rien voir, ne rien entendre, absents de la planète, ils auront plus tard un autre comportement ajouté à celui qu’ils ont déjà adopté ; il va falloir qu’ils gèrent leur conscience… et puis laissez- moi leur dire que cela n’arrive pas qu’aux autres, on ne choisit pas d’être malade, ni l’endroit  où on doit naitre, ou encore  sa couleur de peau. Et puis, Noire, Jaune, Rouge, Blanc, quand on pleure, nos larmes sont toutes salées ! Sous terre on est tous EGAUX !!!


La rédaction  avec Jenny Hippocrate Présidente de l’APIPD

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