« Ce n’est pas une crise, c’est un problème systémique. Il faut changer le système. » C’est la conviction du Défenseur des droits, Jacques Toubon, à l’issue de sa rencontre, mercredi après-midi, au conseil départemental de la Guadeloupe, avec les usagers de l’eau, en présence des représentants de l’État, de la Région, du Département et de l’Office de l’eau. Cette visite sur deux jours, mercredi et jeudi, s’inscrivait dans le cadre de la 3e édition de l’opération Place aux droits. Le Défenseur des droits, accompagné de 17 agents du siège, a, ainsi pu s’imprégner des préoccupations de la population, à travers les interventions des représentants des associations et comités de défense des usagers.
DES CONTRATS DE PROGRÈS
En prélude au débat, le Défenseur des droits a précisé les leviers sur lesquels il pouvait intervenir en matière de travaux d’urgence et de gouvernance du système. « Ce que je peux faire, c’est agir pour que tout soit fait à travers des contrats de progrès », a-t-il dit. Il s’agira de « répondre aux questions quotidiennes des usagers notamment sur les factures reçues et les difficultés à les honorer », mais aussi d’aller plus loin en continuant à « travailler sur le droit des usagers et sur la qualité des services qu’ils attendent ».
LE DROIT EST BAFOUÉ
Le vaste tour d’horizon avec les différents intervenants a abouti à une évidence : le droit de la population guadeloupéenne à bénéficier d’une eau en qualité et quantité suffisantes existe. Reste à savoir comment faire appliquer un droit qui est bafoué. Qui va relever le défi de mettre les opérateurs devant leurs responsabilités, quand tout le monde sait l’état de leurs finances ?
DEMANDE SOLENNELLE DE L’OFFICE DE L’EAU
Même l’Office de l’eau a toutes les peines du monde à recouvrer 22 millions de créances, qui ont déjà été payées aux communautés d’agglomération par les usagers, mais qui ne lui ont toujours pas été reversées, alors que son plan pluriannuel d’investissement 2019-2024, axé sur le traitement des eaux usées, reste à financer. La demande solennelle de son directeur, Dominique Laban, adressée au Défenseur des droits pour l’aider à recouvrer cette somme, est significative des difficultés rencontrées pour faire appliquer le droit.
Avant la réunion avec les usagers, Dominique Laban avait déjà très bien présenté la situation de l'Office de l'eau au Défenseur des droits, mais il a tenu à faire sa demande d'aide de manière solennelle.
DES APPELS DE DÉTRESSE
Que peut-on faire pour faire entendre notre droit ? Dans quelle mesure pouvez-vous nous assurer que l’usager qui vient réclamer son droit sera respecté ? Doit-on faire sauter les factures d’eau abusives quand les gens sont obligés d’acheter de l’eau en bouteille ? Des questions qu’on peut assimiler à de véritables appels de détresse, qui ne trouveront pas de réponse dans le système actuel.
LE SYNDICAT UNQUE EST À OUBLIER
La question du syndicat unique aurait pu être une solution, mais c’est un modèle à oublier, selon Jacques Toubon, qui note sur ce point que « nous avons un caillou dans la chaussure avec la loi NOTRé, qui a donné la compétence eau et assainissement aux communautés d’agglomération, alors qu’elles n’ont pas les moyens pour exercer cette compétence avec efficacité ». Selon lui, il faut oublier la structure unique mais «cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas faire de la mutualisation ».
MESSAGE DE CONFIANCE ET D’ESPOIR
Jacques Toubon a tout de même conclu sa contribution par « un message de confiance et d’espoir pour faire avancer les choses sur le terrain, mais aussi dans le système ». Le séminaire des usagers de l’eau programmé au mois de janvier 2019 devrait permettre de poursuivre la réflexion. De leur côté, les agents de la délégation du Défenseur des droits vont, à partir de l’expérience de la Guadeloupe, travailler à trouver un système de gestion applicable à toutes les régions.
Les usagers de l'eau ont exprimé leurs doléances avec fermeté.