Société

jeudi, 07 novembre 2013 09:14

Thierry Desroses - Acteur résolu Spécial

Écrit par Willy Gassion
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Thierry Desroses est acteur, réalisateur et comédien. L’artiste d’origine martiniquaise, héros des séries « PJ » et « La cour des grands » s’est confié à Outremerlemag.

La nuit est arrivée pas encore totalement noire. Et avec elle, une pluie froide. Bienfaitrice pour les plantes. Thierry Desroses sort de son jardin comme d’une journée de travail. Il s’ébroue et entre dans sa cuisine. Lulu, son chat obèse au poil roux l’accueille. « Il est  castré », précise le comédien. Loulou est là aussi. Son autre chat, frère du premier, obèse lui aussi et même poil roux. « J’ai passé la journée dans mon jardin, travailler la terre, c’est pour moi un vrai plaisir », confie Thierry Desroses.


Surprendre Thierry Desroses dans son jardin, c’est comme cueillir le comédien dans les coulisses, là où le spectacle n’est pas. C’est être là où se fait le travail, où les gestes se répètent d’abord dans la maladresse, la souffrance, la sueur, le doute et peut-être le plaisir aussi. Sarcler, bêcher, élaguer, la répétition de ces gestes-là, n’est elle pas la métaphore du travail du comédien. A savoir répéter un texte, le décortiquer, le questionner, s’approprier les mots jusqu’à être le personnage et atteindre sa vérité. « Dans mon travail d’acteur, je suis quelqu’un de laborieux qui a besoin de chercher, de fouiller. » Répéter à l’envi les mêmes gestes et découvrir dans la lumière grise et crépusculaire de cette fin d’après midi, la beauté d’un rosier en fleurs. Ou la satisfaction du public. Il est là, le salaire du jardinier et de l’artiste.

Nait-on acteur ou le devient-on ? Thierry Desroses est né avec « l’envie de s’exprimer ». Une « envie » chevillée au corps. Siamoise. Cette envie-là, comme une évidence physique. Cette envie-là, composante essentielle et particulière de sa personnalité. « On vient au monde avec ça comme on vient au monde avec un physique plus ou moins harmonieux. On vient au monde avec cette envie d’expression, de vivre des choses. Ça fait partie des gènes. »

Le comédien dit « envie » mais on entend « besoin ». Besoin d’être ce qu’il est. Résolument. Comment échapper à soi et aux promesses de l’enfance ? A ce que l’on a toujours été. S’écouter et y être fidèle. Thierry, enfant s’était déjà trouvé. Déjà sur scène, déjà comédien. Déjà lui-même. Face à sa mère comme premier public. « Aussi loin que je me souvienne, lorsque j’étais enfant ma mère me disait ; arrête de faire ton intéressant. J’avais toujours quelque chose à raconter. A l’école, c’était moi qui faisais rire les copains. Je faisais rire tout le monde. » « Tout le monde » sauf son père qui riait jaune et rêvait son fils en « médecin ou avocat ». « Mon père considérait qu’être artiste, n’était pas du tout un métier digne de respect. Je suis issu d’une génération où il fallait avoir des diplômes. »



Etre un artiste et s’exprimer. Sans les mots. D’abord avec le corps. Découvrir fasciné le langage du corps. Et son spectacle aussi. Thierry Desroses a cinq ans. « Ma sœur ainée prenait des cours de danse classique et avec mon père nous allions la chercher et ce que je voyais me fascinait.» La danse de sa sœur donc mais aussi les comédies musicales de Fred Astaire et de Ginger Rogers découvertes à la télévision. « Exprimer des choses avec le corps, je trouvais ça magique, vraiment très beau. » Danser comme sa sœur, danser comme Fred Astaire, danser pour dire. Et danser malgré le refus du père. « Pour mon père, la danse ce n’était pas un sport de garçon. J’ai pris des cours de danse en cachette, du moderne jazz que je payais avec mon argent de poche. Les cours avaient lieu avant le judo que je pratiquais aussi. Ça a duré deux ans. Et un jour, mon père l’a découvert et il m’a retiré de la danse et du judo. Je devais avoir quatorze ans. »

Thierry Desroses sort de l’adolescence avec le bac en poche mais famélique. Privé pendant des années de danse et de toute expression artistique, le jeune homme veut « rattraper le temps perdu.» Il s’inscrit dans une école de comédie musicale où il suit des cours de danse classique, de  jazz, d’acrobatie, d’art dramatique, de chant lyrique et de variété. « J’avais l’impression d’être comme quelqu’un qui travaille la terre, je modelais mon corps pour un art. Et je trouvais ça fascinant. » Déjà son rapport à la terre… « Carnaval », l’émission de variétés de Patrick Sébastien sera le premier engagement de Thierry Desroses en tant que danseur. D’autres engagements et d’autres émissions de variétés suivront comme celles de Maritie et Gilbert Carpentier. Et aussi une comédie musicale, « La Valise en carton » de Linda de Suza au Casino de Paris.

« Le besoin d’expression » de Thierry Desroses n’est pas assouvi avec la danse. Il demeure étrangement intact. Peut-être parce que, être danseur c’est aussi être dans l’ombre de la vedette qu’on accompagne. C’est savoir se contenter de la portion congrue de la scène. « J’avais le sentiment de ne pas être à ma place. Je dansais derrière les chanteurs comme Dalida ou Julio Iglesias. J’avais envie d’être devant, de m’exprimer, qu’on me regarde. J’ai aussi réalisé que ma carrière de danseur allait être courte puisque je l’avais entamée tardivement et en plus elle ne m’épanouissait pas tant que ça. » Etre devant donc. Dans la lumière. Et laisser le corps en jachère pour mieux s’exprimer, autrement et pleinement. Avec les mots cette fois-ci. « J’ai passé une audition pour faire du théâtre et j’ai travaillé avec Niels Arestrup, un grand comédien, pendant deux ans. J’ai découvert des textes, des auteurs, la richesse de la langue française et j’ai adoré ça. J’ai compris que c’était ça que je voulais faire.»  C’est Jean-Michel Ribes, l’actuel directeur du théâtre du Rond-point qui lui offre son premier rôle important au théâtre dans une pièce d’Offenbach : « Le pont des soupirs ». Thierry Desroses c’est aujourd’hui plus d’une centaine de films et téléfilms. Des rôles principaux dans des séries télévisées (PJ et La cour des grands), de la mise en scène et la réalisation de documentaires. Encore et toujours son « besoin d’expression » qui semble inextinguible. L’acteur se définit comme « une éponge ». Perméable à son environnement, Thierry Desroses absorbe, se nourrit et « s’enrichit » de ce qui bouge autour de lui. La vie. Y prendre part et l’observer. En être à la fois acteur et spectateur permet justement à Thierry Desroses d’apprendre, de progresser et de se « bonifier. » « Bien sûr il y a un travail technique à accomplir pour être comédien mais il y a aussi le reste : le travail de la vie. Un comédien s’enrichit de ce qu’il lit, de ce qu’il découvre, des expos et des pièces de théâtre qu’il voit. Tout ça rend son être plus riche et la coquille est de plus en plus remplie. »

Thierry Desroses est là où il souhaitait être. Et il est devenu ce qu’il a toujours été. Depuis toujours, depuis l’enfance. Sur scène comme dans son jardin, à travailler la terre ou à dire ses textes. Thierry Desroses est obstinément au service de l’art.

Photos : Ledroit-Perrin

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