Société

vendredi, 12 juillet 2013 08:08

Mandela ou l’histoire d’une longue marche vers la liberté

Alors que Nelson Mandela est en train de nous faire ses adieux, on constate que le monde entier est, d’une certaine manière, au chevet d’une des figures politiques les plus marquantes de la seconde moitié du XXe siècle. Mandela s’en va en guerrier mais aussi en pacificateur, au terme d’une vie marquée par un destin incroyablement puissant, celui d’un chef de tribu qui avait une mission à accomplir sur terre: ramener une paix durable dans son pays.

Nelson Mandela est né le 18 juillet 1918 à Mvezo petit village du district d’Umtata capitale du Transkei en Afrique du Sud. C’est l’année de la fin de la 1e Guerre Mondiale ; d’ailleurs une délégation de l’ANC a été reçue à la conférence de la paix de Versailles afin de faire valoir les griefs légitimes du peuple sud-africain. Favorable à la politique de non-violence jusqu’au massacre de Sharpeville du 21 mars 1960, Nelson Mandela, n’hésitera pas par la suite à prôner une politique de boycott économique à l’égard de son pays.

Que doit-on retenir de Mandela ? Certainement le souvenir d’un homme qui sera resté 27 ans en prison avant de retrouver la liberté et qui contraignit le gouvernement de son pays à mettre fin à l’apartheid.

Le 11 février 1990, après 27 ans passés dans la prison de Robben Island, Nelson Mandela était finalement libéré, « inconditionnellement », par le gouvernement de Frederik DE KLERK.

A y regarder de plus près, l’héritage que nous laisse Nelson Mandela est bien plus important que nous le croyons, ou qu’il peut sembler à première vue.  Un héritage sur lequel nos sociétés occidentales, et l’Europe en particulier, doivent méditer tant il nous invite à ne pas renoncer aux valeurs humanistes  et sociales qui sont fondamentales, au risque sinon de voir nos sociétés courir à leur perte.
Le combat de Mandela est tout d’abord celui de l’égalité. Egalité entre les blancs et les non blancs, Sud-Africains en particulier, qui se traduira par la revendication de l’application du principe « one man one vote », introduit par Alfred Xuma dès 1945.

Egalité ensuite entre tous les citoyens sud-africains quels qu’ils soient. N’oublions pas que c’est d’Afrique du sud qu’est né l’engagement du Mahâtma Gandhi en faveur des droits civiques de la communauté indienne entre 1893 et 1914.
L’égalité est pour Mandela qui avait créé le premier cabinet d’avocats dédié à la défense des droits de ces concitoyens,  une règle intangible, non négociable, au point d’avoir préféré demeurer en prison plutôt que d’être libéré. Combien de fois lors de négociations  secrètes, Mandela ne s’est-il pas vu offrir par le pouvoir en place, la liberté contre la renonciation à ce principe, pour à chaque fois refuser? 
Le sacrifice d’une vie au service de l’Egalité des Droits, comme pour nous dire « ne renoncez jamais, ne transigez jamais » sur cette valeur ô combien sacrée ! En ce XXIe siècle, où tout est à l’échelle planétaire, ne devons-nous batailler pour que cette valeur de l’Egalité soit planétairement partagée et non plus limitée à quelques-uns si nous voulons un monde en paix et vivre en sécurité. Oui, nous pouvons voir dans l’action de Mandela un encouragement à poursuivre une œuvre qui n’est pas complètement achevée, à savoir faire en sorte que les Humains de cette planète soient égaux. N’y a-t-il pas encore une autre page de l’histoire de l’humanité à écrire pour que cette notion d’égalité devienne effectivement partout réalité.

Le combat de Mandela pour l’établissement d’une Afrique du sud « Nation arc en ciel » est la colonne vertébrale de son action politique. On a pu lire ou entendre de la bouche de certains que la « Nation arc en ciel »  ou multi-ethniques est le signe de sociétés en déclin. C’était d’ailleurs la théorie de ceux qui établirent l’Apartheid, et c’était aussi la thèse des ségrégationnistes américains.

En Europe, des voix certes minoritaires jouant sur les peurs et les difficultés sociales de nos concitoyens, se sont souvent élevées pour soutenir que la présence sur le sol européen de personnes non indo-européennes était un danger pour l’Europe et facteur de déclin et d’instabilité. Mandela, qui aurait pu revendiquer que l’Afrique du Sud appartenait à la seule majorité noire, aux africains que d’aucuns qualifieraient « d’africains de souche », s’y est toujours refusé.

On retiendra dans l’héritage laissé par Madiba qu’il n’y a plus deux catégories de sud-africains, ceux qui seraient de souche tels les Zulu, bantou ou encore Sothos d’une part et ceux qui ne seraient pas de souche, tels les Afrikaners d’autre part. On peut alors justement se poser la question : comment – dans une sorte d’effet miroir – ne pas affirmer  que nous Français devons combattre l’expression et l’idée même qu’il y aurait des Français ou des Européens « de souche » et d’autres qui ne le seraient pas.

L’héritage politique de Madiba nous invite à former un peuple au service de son pays,  c’est cela que nous devons reconstruire. La société arc en ciel, ne veut en aucun cas dire une société sans culture mais au contraire une société au sein de laquelle toutes les cultures peuvent cohabiter et enrichir à la fois le collectif et l’individuel. La langue des Afrikaners n’a pas disparu et est toujours étudiée comme d’autres langues dialectales qui, ensemble, font bien une des richesses sociale, humaine et économique de l’Afrique du sud.

Pour mettre en place la société arc en ciel, la Commission « Vérité et réconciliation » créée en 1993 et présidée par Mgr Desmond Tutu, archevêque anglican de Johannesburg et Prix Nobel de la Paix a témoigné de la capacité des victimes qui étaient pour la plupart noires à renouer le dialogue avec les bourreaux qui étaient pour la plupart blancs du régime de l’apartheid afin de reconstruire sans délai le pays. Pardonner ne veut pas dire oublier mais c’est avoir la force de réaffirmer que la part de lumière de l’homme doit être plus forte que sa part d’ombre.

Aucune société ne peut se construire durablement après un tel drame sans réconciliation et tout le combat de Mandela a consisté non seulement à lutter contre cette Afrique du Sud qu’il refusait, celle de l’apartheid, mais aussi à construire cette Afrique du Sud « réunie » à laquelle il aspirait.
Non, le message politique de Mandela n’est pas limité à l’Afrique du Sud, il est universel. Ce message s’adresse à la planète toute entière alors que des affrontements de nature religieuse ou communautaire n’ont jamais autant menacé la paix dans le monde. C’est cela l’héritage de Mandela qui a par ailleurs refusé la « starisation » ou encore être considéré comme une « icône » mais comme homme de Paix.
Le combat de Mandela est entièrement dévolu à la mise en œuvre d’un véritable pacte social et au meilleur partage des richesses. Il s’agit en effet pour Madiba que chacun puisse s’épanouir dans son pays. Il n’est cependant pas sérieusement contestable que le pouvoir économique en Afrique du Sud, demeure aux mains d’une petite minorité et que le pays est fortement miné par les distorsions sociales et par la violence. Souvenons des récentes grèves des travailleurs dans les mines de platine ! Alors poursuivre l’œuvre de Madiba consistera précisément à trouver les voies et les moyens pour assurer le partage des richesses d’un pays qui a la plus forte économie en Afrique subsaharienne.

Peut-on terminer en faisant observer que les ultra-marins que nous sommes, bien que n’ayant jamais vécus dans des sociétés officiellement ségrégées, ne pouvons rester indifférente à ce message de Mandela tant il est vrai que notre histoire présente des similitudes. Comment par exemple expliquer l’explosion sociale en Outre-mer au début de l’année 2009 et comment expliquer que la violence gangrène désormais le quotidien de nos îles ? Il est peut-être temps que nous aussi nous penchions réellement sur la reconstruction du Pacte social tant au niveau national que régional et que chacun comprenne que nul n’a plus intérêt à jouer des divisions et laisser les choses en l’état.

En définitive, quel destin que celui de ce Sage africain qui dans un ultime combat, celui contre la mort, invite les hommes et les femmes de bonne volonté à s’engager, s’engager au service d’une société où l’Egalité, la Liberté et une réelle Fraternité seront désormais de mise !

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