Société

jeudi, 19 avril 2018 14:45

Steevy Gustave : « Notre monde est fait pour se mélanger »

Steevy Gustave lors de la Dictée pour tous, le 13 avril à Brétigny-sur-Orge Steevy Gustave lors de la Dictée pour tous, le 13 avril à Brétigny-sur-Orge  © Maxime Morais

Ancien champion de danse hip-hop, chorégraphe de France Gall et proche de Christiane Taubira, Steevy Gustave est dans la politique depuis bientôt 20 ans. Elu maire-adjoint à Bretigny-sur-Orge en 2008, le natif du Val d'Orge a passé un nouveau cap le 16 février dernier en étant élu conseiller communautaire à Cœur Essonne. Atypique, le Martiniquais entend bien continuer son combat contre le communautarisme. Interview.

Outremerlemag : Avec votre nouveau mandat vous allez continuer de mettre du lien entre les gens ?

Steevy Gustave : Bien entendu. Même si pour le moment je suis dans la délégation de l’économie, je vais bientôt me rediriger vers l’éducation et le social. Pour moi c’est vraiment la continuité du travail que j’ai effectué à la Mairie de Bretigny, parce qu’aujourd’hui avec les nouvelles compétences des communautés d’agglomération, les municipalités ont de moins en moins d’outils pour faciliter la vie quotidienne des habitants, notamment de la jeunesse. J’ai beaucoup pris exemple sur l’ancien maire de Brétigny, Bernard Decaux. Avec lui dès qu’il y avait quelque chose de cassé, on le remplaçait. Aujourd’hui il faut développer les écoles, les routes, améliorer les transports et que les habitants des banlieues puissent se rendre gratuitement sur Paris.

OLM : Vous vous êtes toujours occupé des « gamins du quartier » à Bretigny, aujourd’hui votre champ d’action est-t-il plus vaste ?

S.G : Lorsque j’étais à la mairie de Bretigny, je ne m’occupais pas que des gamins de quartiers populaires , quand on faisait un évènement ou autre, il y avait des gamins d’autres villes qui venaient et ils étaient de toutes origines sociales. En m’occupant de la jeunesse j’ai toujours essayé de promouvoir la mixité et ainsi combattre le communautarisme. Et je continue encore aujourd’hui. Le 13 avril, à Cœur Essonne nous avons monté une dictée intergénérationnelle, à Bretigny. Il y a eu 557 personnes venant de maison de retraites, d’écoles primaires, de collèges, de lycées. Une dame de 99 ans pouvait discuter avec un enfant de 10 ans, et elle a même dansé avec lui. Elle est là, mon action.

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L'actrice Guadeloupéenne Firmine Richard a honoré la dictée de sa présence. © Maxime Morais

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Steevy Gustave en compagnie du chanteur Hugues Aufray, qui a participé à la dictée © Maxime Morais

OLM : Pourtant à l’heure actuelle, avec les vagues d’attentats qui ont touché la France métropolitaine, le « vivre ensemble » a pris du plomb dans l’aile.

S.G : Très souvent ceux qui parlent de vivre ensemble ne connaissent pas le mot. Le vivre ensemble a toujours existé, notamment dans la fameuse société black blanc beur mis en avant dans les médias. Il y a 25 ans les gens pouvaient se parler. En 2001 avec les attentats des twin towers, les médias ont commencé à donner leur définition du vivre ensemble, et elle n'est jamais positive. En 2013, ils ont commencé à le remettre en cause. Il y a de très belles histoires dans les banlieues, une incroyable solidarité mais elles ne sont jamais mises en avant. Malheureusement à cause de cela, les gens se regardent en chien de faillance.

OLM : Si le terme de vivre ensemble est galvaudé, selon vous l’urgence aujourd’hui c’est d’être ensemble ?

S.G : Vous savez il y a des coins de France où la question ne se pose pas, en Outre-mer par exemple. Notamment La Réunion où il y a un métissage inouï ! Qu’il soit religieux, sociale ou culturel. Tout le monde vie ensemble, parle la même langue, et personne ne se pose la question s’il est possible de vivre ensemble. Notre monde est ainsi fait. Il faut que les gens qui le remettent en cause sortent de leur bulle, notre monde est fait pour se mélanger. Dans ma famille ont ne s’est jamais posé la question. Mon père était Martiniquais, ma mère est Cap-verdienne, ma famille vit aux Etats-Unis, moi je suis quarteron, la mère de mon enfant est blanche, mon fils est donc métisse, bref ma famille c’est l’ONU.

OLM : Justement en parlant d’Outre-mer, quel est votre regard sur ces territoires ?

S.G : Tout comme les banlieues, les Outre-mer sont des territoires oubliés. Mais en même temps je les trouve très sage. Il serait temps qu’il y ai une vraie politique pour les Outre-mer. Parce qu’a un moment donné, si l’on nous dit que la France est une et indivisible, il faudrait que les gamins de Saint-Esprit en Martinique (commune dont il est originaire) aient les mêmes droits que ceux du Lycée Henri IV à Paris.

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Steevy Gustave est un proche de l'ancienne Garde des Sceaux.  © Facebook Steevy Gustave

OLM : En 2015 vous avez travaillé au ministère de la Justice avec Christiane Taubira pendant un an. Elle vous avait chargé de porter la culture en détention. Quel souvenir gardez-vous de votre contact auprès d’elle ?

S.G : J’ai toujours un bon contact puisque je la connais depuis 20 ans. Christiane Taubira est une femme que j’aime. Elle est brillante, c’est un vrai tribun, vous lui donnez un discours en charbon, elle vous rend un diamant. Elle ne fait pas semblant, avec elle il n’y a pas de passe-droit. Avant qu’elle ne parte, tout les ministres l’avaient supplié de rester et son discours de départ a été complètement improvisé. Pour moi Christiane Taubira c’est le parfait exemple de ce que j’appelle l’effet miroir. C’est-à-dire le type de personne en qui l’on peut se reconnaître, qui inspire et à qui on peut s’identifier. C’est une femme qui vous élève lorsque vous la côtoyez.

OLM : Christiane Taubira manque politiquement à la France selon-vous ?

S.G : Absolument ! D’ailleurs pour la petite histoire, on a essayé de monter « une team Taubira » en 2017 afin qu’elle se présente à l’élection présidentielle. On s’est réunis tous les deux mois pour tenter de la convaincre. Et elle nous a répondu : « Vais-je apporter quelque chose en plus ? » C’est dommage, j’aurais aimé voir une femme Présidente de la République, qui plus est Christiane Taubira. C’est une fanm doubout qu’il manque à la France.

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