Ces chiffres reflètent certes une réalité arithmétique, mais révèlent surtout un fait politique. Le cumul des mandats est une vérité politique qui trouve ses justifications dans l’architecture jacobine de la France. Cette évidence politique nous permet également de mieux comprendre les raisons pour lesquelles l’actuelle majorité, tiraillée entre ses promesses électorales et la nécessité de conserver une majorité absolue qui s’est effritée à l’occasion des diverses élections législatives partielles, ne veut plus que les projets de loi contre le cumul des mandats s’applique dès 2014. Les effets de ces textes seraient délétères pour les actuels équilibres politiques.
En effet, si tel était le cas, considérant que la majorité absolue au sein de cette chambre parlementaire est de 288 sièges, il est plus que probable que l’Assemblée nationale ne serait plus à gauche, puisque les élections partielles qui ne manqueraient pas d’être déclenchées du fait de la démission de celui-ci ou de celui-là, ouvriraient la porte de « Bronze » à de nouveaux députés appartenant très probablement à l’UMP ou à l’UDI, comme ce fut le cas pour les 8 dernières législatives partielles.
Autrement dit, si cette loi devenait applicable au 1er janvier 2014, la Gauche perdrait certainement la majorité absolue, et très probablement la majorité tout simplement.
En clair, des élus tel que Jacques Gillot sénateur et président du Conseil Général de la Guadeloupe, Serge Letchimy député et président du Conseil Régional de la Martinique, Gaston Flosse sénateur et président de la Polynésie Française, Huguette Bello député-maire de la Réunion , Ary Chalus député-maire de la Guadeloupe, ou encore Eric Jalton également en situation de cumul, à l’instar de Hélène Vainqueur, et Gabrielle Louis-Carabin, Nestor Azérot, Patrick Lebreton, Thierry Robert pour ne citer que ceux-là… ne pourraient plus cumuler.
Comme il est confortable de faire des promesses populistes lors de la dernière campagne présidentielle, mais qu’il est difficile en l’espèce de respecter ces promesses qui équivalent en vérité à un suicide politique collectif en bonne et due forme.
En vérité, l’actuelle majorité « bat une marche arrière ».
Cette marche arrière de l’actuelle majorité et du Gouvernement nous rappelle le rétropédalage des élus locaux de la Guadeloupe, qui en 2004, alors qu’ils étaient très favorables à une assemblée unique, ont « tourné casaque » chemin faisant, lorsqu’ils comprirent que leurs effectifs s’en trouveraient diminués de moitié si un tel projet aboutissait.
Le courage politique a donc ses limites ! Et le changement en la matière sera en réalité en 2017.
Les débats sur les deux projets de loi sur le non cumul des mandats qui vont débuter dès le mercredi 3 juillet, vont être riches d’enseignements, tant pour l’hexagone que pour l’Outre-mer.
A ce stade de la procédure parlementaire, les projets de loi prévoit une application « à tout parlementaire à compter du premier renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient suivant le 31 mars 2017 ». En fait, le bouleversement du paysage politique est bel et bien programmé pour 2017, qui sera à vrai dire l’année des élections présidentielles, des élections législatives et très certainement l’An I de la création de nouvelles baronnies politiques en France, de nouvelles baronnies au service des partis politiques.
En affichant un renouvellement du personnel politique, il est à craindre que le législateur ne contribue qu’à renforcer le poids des partis quant au choix de ceux qui devront appartenir aux chambres parlementaires et de ceux qui devront verrouiller les ancrages locaux. Les défenseurs du slogan : un homme un mandat, sont-ils également les défenseurs d’une nouvelle féodalité politique ?
A chacun de fourbir ses éléments de réponse à cette question !
Mais il nous faut préciser, en raison de notre tropisme ultramarin, qu’il ne serait pas inopportun que les électeurs se posent la question du non cumul des mandats dès 2014 au moment de glisser dans les urnes, leur bulletin de vote.
Voici un extrait du PROJET DE LOI ORGANIQUE :
Vu l’article 39 de la Constitution,
( Décrète : Le présent projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, délibéré en conseil des ministres après avis du Conseil d’État, sera présenté à l’Assemblée nationale par le ministre de l’intérieur, qui sera chargé d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion.
Article 1er
Après l’article L.O. 141 du code électoral, il est inséré un article L.O. 141-1 ainsi rédigé :
« Art. L.O. 141-1. – Le mandat de député est incompatible avec :
« 1° Les fonctions de maire, de maire d’arrondissement, de maire de secteur, de maire délégué et d’adjoint au maire ;
« 2° Les fonctions de président et de vice-président d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ;
« 3° Les fonctions de président et de vice-président de conseil général ;
« 4° Les fonctions de président et de vice-président de conseil régional ;
« 5° Les fonctions de président, de membre du conseil exécutif de Corse et de président de l’assemblée de Corse ;
« 6° Les fonctions de président et de vice-président de l’assemblée de Guyane et de l’assemblée de Martinique, de président et de membre du conseil exécutif de Martinique ;
« 7° Les fonctions de président, de vice-président et de membre du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; de président et de vice-président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie ; de président et de vice-président des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie ;
« 8° Les fonctions de président, de vice-président et de membre du Gouvernement de la Polynésie française ; de président et de vice-président de l’assemblée de la Polynésie française ;
« 9° Les fonctions de président et de vice-président de l’assemblée territoriale des îles Wallis et Futuna ;
« 10° Les fonctions de président et de vice-président des conseils territoriaux de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de président et de membre des conseils exécutifs de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Saint-Pierre-et-Miquelon. »)




