Politique

jeudi, 18 avril 2013 04:51

"Loi Lurel sur la régulation économique de l'Outre-mer... Effets pervers"

La loi Lurel sur la régulation économique de l’Outremer, énième loi sur la vie chère, a remis au gout du jour le modèle d’une économie administrée. De très nombreux économistes estiment que le 21e siècle sera celui de la régulation : régulation des marchés, des contrats, le libre marché n’est pas un vaste champ de bataille sans foi ni loi. La régulation est utile et elle est nécessaire. Cependant, la loi Lurel va beaucoup plus loin que la simple régulation pour se situer dans le champ de l’administration directe. C’est une erreur profonde d’analyse qui pourrait se payer au prix fort.

Deux avocats et un ancien ministre, M. Dominique Perben, ancien Garde des Sceaux ont justement fait observer dans les colonnes de France Antilles que le texte portait des incertitudes juridiques et « pourrait aboutir à un résultat opposé à celui qui est recherché ».  Attendons de voir quelle sera l’applicabilité du texte. S’il est frappé de nombreux recours, le gouvernement n’aura qu’à revoir sa copie tant le temps presse. L’urgence ne justifie cependant pas l’à peu près législatif qui entoure la loi. Sur les questions de doctrine économique, la loi Lurel pose plusieurs problèmes simples :

a) Le représentant de l’Etat pourra fixer unilatéralement les prix de produits dits de première nécessité. Cette mesure porte une bonne intention sociale, mais elle sera économiquement contre productive. Les prix encadrés porteront sans doute sur des marques blanches. Les distributeurs seront naturellement tentés de rationner le marché sur les gammes de ces produits. Par ailleurs, la loi interdit la revente à perte. Sur ces produits de première nécessité, souvent importés et faiblement valorisés, la logistique participe à la formation du prix public. L’encadrement des prix, surtout en cas de flambée du cours des matières premières, est une menace pour toute la chaine de valeur. Disons le clairement ; en Outremer, ce ne sont pas les prix qui sont trop élevés, ce sont les salaires qui sont trop bas !

b) La loi Lurel entend lutter contre les abus de position dominante. Faut-il ici rappeler que la loi sur les concentrations est régulièrement violée sans que l’Etat n’ait eu à s’en inquiéter jusqu’à ce jour? Y compris quand un justiciable obtient gain de cause en Guadeloupe (Affaire Parfait contre GBH). La loi évoque l’hypothèse de ventes forcées et de cession d’actifs. Soit ! Permettez-moi d’attendre pour voir… Sur le fond, la concurrence est un idéal, mais il faut aussi tenir compte de la nature du marché où elle doit s’appliquer. Sur des micros marchés, comme aux Antilles, la taille est un facteur de productivité. Dans certains cas, et c’est un paradoxe,  trop  de concurrence, c’est à dire la fragmentation du marché, rendent impossible la baisse des prix. Plus un acteur  achète, plus le prix unitaire est faible. C’est la promesse de la massification.

c) Enfin, troisième élément en discussion, certaines exclusivités d’importation pourraient être réputées illicites.  Toute la communauté économique y verra une rupture des principes fondateurs de la liberté du commerce. Là encore, l’intention est bonne (déboulonner les Bastilles) mais la méthode est presque pire que le mal. Dans le commerce des marques, les exclusivités et les droits sont là pour rémunérer les novations et les efforts commerciaux. La loi Lurel entend non seulement rétablir le contrôle des prix qui détruit de la valeur, mais elle ouvre le droit de contrôle sur les mécanismes de distribution. Nous sommes à deux doigts d’une économie sous tutelle.

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