« Aujourd’hui, nous avons posé un cadre pour permettre aux communautés d’agglomération de foncer. » a lâché Ary Chalus, le Président de la Région Guadeloupe, à l’issue de la signature d’une convention tripartite (Etat, Région, Département) en Préfecture, le 24 septembre dernier. Cette convention offre aux travaux de réhabilitation du réseau d’eau potable le cadre légal du Plan Eau DOM (voir encadré). Parfaitement accordés, les trois acteurs ont tenu le même langage : en finir avec les tours d’eau d’ici les 18 mois à venir.
Déjà préconisé par un rapport d’expert paru en juillet dernier, la fin des coupures d’eau est désormais inscrite dans le marbre par cette convention. Mais pour l’heure l’urgence de la situation reste inchangée : plusieurs milliers de Guadeloupéens sont encore privés d’eau potable. Une situation inqualifiable pour un pays développé selon le Préfet. « Au 21ème siècle, dans un pays civilisé, quand on tourne le robinet, l’eau coule », a lâché sans détour, Philippe Gustin, qui a défini clairement les 3 axes prioritaires de sortie de crise.
La balle dans le camp des Communautés d’Agglomération
Absents à la table de signature, les Présidents de Communautés d’Agglomération ont pourtant été au centre de plusieurs interrogations. Et pour cause, ils restent les seuls compétents dans la gestion de l’eau en Guadeloupe, conformément à la loi NOTRé. C’est surtout une histoire de gros sous. Alors que la Région (30 millions) ; le Département (30 millions) et l’Etat (11 millions) ont annoncé avoir débloqué des budgets pour réhabiliter les réseaux de distribution, le silence plane sur les budgets des Communautés d’Agglomération. Les autorités majeures n’ont pas tardé à l’évoquer. Elles ont invité les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) à intégrer le Plan Eau Dom afin de mettre en route véritablement le plan d’urgence annoncé en février dernier.
Pour entrer dans le rang, les collectivités locales devront signer des contrats de progrès qui leur permettront de s’équiper légalement pour la mise en place d’un réseau de distribution d’eau potable de qualité. Ce contrat permet de faire un état des lieux des réseaux, mentionne les travaux à effectuer, désigne les maîtres d’ouvrages et surtout le financement. Or, dans la mesure où les caisses des communautés d’agglomération sont aussi percées que les réseaux d’eau, elles ne sont donc pas en capacité de financer les travaux de réhabilitation nécessaires. Odile Lapierre, directrice de l’Agence Française de Développement, en faisait déjà état, le 3 février dernier.
Une des solutions évoquées, renflouer les caisses des communautés d’agglomération, serait d’arriver à diminuer drastiquement le taux de facture d’impayé. En Guadeloupe, entre 36% et 44% des factures d’eau ne sont pas payées. C’est un manque à gagner considérable pour les EPCI qui ne peuvent donc pas avoir la ressource pour la réfection des réseaux. Certes, mais à ce constat se dresse l’implacable réalité : l’eau ne coule pas dans tous les robinets, presque la moitié de l’eau est perdue dans les canalisations, et cela quand, comme ce fût encore le cas à Basse-Terre au début du mois de septembre, l’eau du robinet est tout simplement impropre à la consommation.
A en croire l'État, la Région et le Département, les problèmes liés à l’eau seront bientôt résolus. Après plusieurs années de promesses et de micmacs administratifs, les Guadeloupéens ne demandent qu’à les croire. Réponse dans 18 mois.
Le Plan Eau DOM
Le Plan Eau DOM a vocation d'accompagner les collectivités compétentes dans l’amélioration de la qualité du service rendu aux usagers. Cette amélioration doit constituer le socle d’une augmentation du consentement à payer des populations vis-à-vis du service rendu et le point de départ d’un cercle vertueux : à court terme, celui d’un retour à l’équilibre des recettes et charges de fonctionnement. A moyen terme, la première brique d’une politique de soutenabilité du service par le renouvellement. Dispositif central du Plan Eau DOM, le « Contrat de Progrès » constitue la pierre angulaire de la démarche, il s'agit d'un contrat d'une moyenne de 5 ans.
Transferts des compétences eau et assainissement dans le cadre de la loi NOTRé
La loi NOTRe du 7 août 2015 prévoit que le transfert des compétences « eau et assainissement » vers les communautés de communes et les communautés d’agglomération, sera obligatoire à compter du 1er janvier 2020. Les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale à fiscalité propre deviendront ainsi les autorités responsables de l’exercice de ces compétences, en lieu et place des communes. Les communautés déjà compétentes en matière d’assainissement collectif ou non collectif doivent se mettre en conformité avec le nouveau libellé de la compétence qui implique d’exercer l’assainissement dans son ensemble.