1/ Migail Montlouis-Félicité : « Sonjé » est le titre du 16ème album de Kassav, pourquoi ?
Jocelyne Béroard : La raison principale est qu’il est le premier depuis la mort de Patrick, il était normal qu’on lui rende hommage. « Sonjé » c’est aussi donner une part au rêve, c’est croire que demain peut être meilleur. C’est donner une impulsion à nos vies. C’est aussi le temps de la réflexion. C’est se dire surtout que les choses sont possibles, c’est le « Yes we can »! C’est surtout se rappeler qui nous sommes et ne pas se perdre.
2/ M. M.-F. : Combien de temps a t-il fallu pour le boucler?
J. B. : On a commencé depuis juillet 2012 à écouter des bases rythmiques. Et le travail sur le CD en studio a débuté en janvier dernier. Le mixage s’est fait en Grèce, à Santorin, où il y un magnifique studio. Il était entièrement à notre disposition, on y a logé pendant tout le temps du mix, ce qui nous permettait de rester ensemble. Partager la même table, Georges (Décimus) cuisinait, de temps en temps on allait au restaurant. On regardait la côte, la mer ensemble et cela change tout.
3/ M. M.-F. : Le nouvel album contient douze titres. Quels sont ceux que tu as écrits ?
J. B. : J’ai écrit les trois titres que je chante et un texte pour Jacob.
4/. M. M.-F. : « Mawonaj ! » Cela signifie t-il que l'engagement culturel de Kassav est toujours lié à l'histoire de nos archipels ?
J. B. : Mais bien sûr, on vient de là, on ne peut se séparer de nos identités. « Mawonaj » parce qu’aujourd’hui c’est « tendance ». On m’a dit par exemple que Kassav ne faisait pas une musique majeure. J’avais envie de répondre « qu’est-ce qu’une musique majeure? ». Je connais les gammes majeures ou mineures, et il y a simplement une musique qu’il faut arrêter de stigmatiser. Et ici, en France, on a trop l’habitude quand on ne comprend pas une culture de la confiner dans le grand panier de la world music. Nous avons choisi de ne pas faire de compromis, et de façon volontaire on « mawone » toutes les tendances, tous ce que l’on veut nous imposer. Notre musique est belle et forte, et nous continuons à la défendre. C’est notre façon de « marronner ».
5/ M. M.-F. : Les concerts « Zénith » sont pour toute l'équipe un super rendez-vous, comment t’y prépares-tu ?
J. B. : On est sans cesse, extrêmement occupés par les répétitions, je ne suis pas disponible pour l’instant. On s’y prépare déjà musicalement, il y a la promo pour le dernier « bébé ». Je commence seulement à penser aux tenues de scène, mais je serai dans l’urgence comme d’habitude (rires).
6/ M. M.-F. : Kassav : ce sont des chiffres étourdissants entre albums et concerts, l’aurais-tu imaginé lors de ton arrivée dans ce groupe ?
J. B. : Peut-être mais je ne me souviens pas vraiment y avoir pensé, en avoir rêvé. Au départ on espérait que nos chansons plairaient au public. En 1982, ça a commencé doucement avec « Zanmi calculé » et en décembre1984 quand l’album de Jacob Desvarieux et Georges Décimus est arrivé, c’était la folie et l’adhésion de tous. Ce qui importait c’était de satisfaire notre public, les nôtres en particulier.
7/ M. M.-F. : Que représente pour toi la maison du Zouk inaugurée en Angola ?
J. B. : Jacob peut mieux y répondre. Je ne l’ai pas encore vue c’est lui qui nous a représentés lors de l’inauguration. Mais il y a déjà eu des maisons du Zouk ou nommées « Kassav » en Afrique* et je trouve cela fabuleux.
8/ M. M.-F. : Vous n’arrêtez pas de tourner et « Sonjé » vous remet à nouveau sur les routes du monde ?
J. B. : Comme dit Jacob notre tournée est à 70-/80% à l’étranger*. On est le groupe français qui se produit le plus à l’étranger. Depuis vingt ans nous sommes toujours dans des avions. On n’a pas cessé de voyager. Nous tournons aussi beaucoup dans les villes de la France hexagonale, surtout lors des sorties de nos albums.
9/ M. M.-F. : Quels sont le dernier film, la dernière pièce que tu aies vus ? Le dernier livre que tu aies lu ?
J. B. : Le dernier film c’est Flight avec Denzel Washington. La pièce je l’ai vue au Théâtre Aimé Césaire en Martinique il y a quelques temps. Quant aux livres, j’en bouquine plusieurs à la fois. En ce moment, je lis un pavé sur l’empathie « Une nouvelle conscience pour un monde en crise », un autre plus facile « La Liste de mes envies *» qui raconte l’histoire d’une femme qui a gagné une énorme somme au loto. Au départ elle le cache à tout le monde parce qu’elle est en panique. Et je vais certainement me plonger dans IQ84. En fait, c’est au hasard de mes inclinations, de mes humeurs dans l’avion que je choisis celui que je vais lire.
*La liste de mes envies de Grégoire Delacourt – Adapté pour le théâtre par Anne Bouvier - http://youtu.be/TffCcm5MXD4
*Kassav en Afrique – Extrait B.World Connection - http://youtu.be/7o3R0a3ynWE
*A l’étranger - Kassav performing live @ Prospect Park in Brooklyn NY
http://youtu.be/ASj8kOtJCkg
Jocelyne Béroard et nos lecteurs !
La Rédaction a donné l’occasion à des fans de Kassav de poser quelques questions à Jocelyne Béroard, et c’est avec plaisir qu’elle y a répondu sans détour.
Gaël : Comment expliques-tu l’exceptionnelle longévité de Kassav et de son inspiration créatrice ? Gaël : Comment est apprécié Kassav par des non-Antillais ? Geneviève : Maintenant il est recommandé de porter une valise de vingt-trois kilos dans les airs. Que mets-tu dans ta valise, comme cadeau pour les êtres chers ? Emilie : Si tu as un regret quel est-il ?
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