Environnement

jeudi, 28 mars 2013 04:29

La Géothermie: un atoût ou un coût?

Au cœur du débat national sur la transition énergétique qui s’est ouvert depuis fin 2012, c’est le type de question qui se pose pour chaque source d’énergie connue.
Après la phase de consultation des experts et des groupes de travail, la parole est désormais aux citoyens. En ce week-end de Pâques, le gouvernement a décidé trois journées nationales de l’énergie. Les grands sites de production seront ouverts au public et  les associations vont organiser un peu partout des rencontres pour informer. Bientôt vont être recueillis les avis des citoyens. Alors que choisir ?
Pour vous aider, durant trois semaines, Outremer le mag’ va  vous conduire au cœur des innovations énergétiques dans les DOM.

 


Quel est l’enjeu du débat national  sur la transition énergétique?
On l’a vu, il est double : d’abord réduire par tous les moyens la consommation électrique en faisant des économies, ce qu’on appelle l’efficience. Ensuite  développer le mix énergétique en réfléchissant à des productions /distributions moins centralisées. C’est en ce sens que les DOM servent une fois encore, de laboratoire. La Géothermie, l’éolien, la bagasse, les énergies marines ont vu leurs premiers succès dans les îles. Par nécessité, parce que  charbon, et pétrole venus d’ailleurs, coûtent très cher. En conséquence, l'électricité produite à un coût trois fois plus élevé qu’en métropole. Grace à un mécanisme de péréquation (CSPE), qui coute très cher à l'état, elle est vendue au même tarif au consommateur îlien qu’à un métropolitain.
Très tôt dans les îles, on s’est donc penché sur l’idée de parvenir à une plus grande autonomie énergétique, par le biais de la maîtrise des consommations et le recours aux énergies renouvelables, que l’on espère à hauteur de 50 % au moins des consommations à l'horizon 2030. Un pari difficile.

 

Le débat qui se déroule dans toute la France jusqu’en juillet 2013 conduira à un projet de loi de programmation en octobre 2013.

Le Conseil national regroupe tous les partenaires (entreprises, syndicats, ONG, producteurs, utilisateurs, distributeurs, etc.). Il s’est réuni trois fois et travaille sur les rapports des groupes de travail. Il va conduire des auditions de la fin mars à début juin. La Journée citoyenne du 25 mai sera un moment fort du débat. A ce jour 19 Régions  se sont engagées.
Enfin, vous pouvez participer au débat sur le site :
http://www.transition-energetique.gouv.fr/search/content/dom

 

A la découverte de LA CHALEUR DE LA TERRE, l’usine de Bouillante

Bouillante est une petite ville sur l’île de Basse Terre en Guadeloupe au pied du volcan de la Soufrière. Un volcan encore en activité dont la dernière éruption remonte à 1976. La seule usine française de Géothermie y produit entre 8 % et 10% de la consommation globale de l’île connectée au réseau EDF. La Guadeloupe, comme la Réunion, est devenue un modèle en matière d’autonomie énergétique. 35% de sa production vient des renouvelables. Elle est donc bien au delà des 25% sur lesquels s’est engagée la France auprès de Bruxelles. Malheureusement sa consommation continue de galoper. http://sei.edf.com/fichiers/fckeditor/Commun/SEI/corp/Bilan-previsionnel-2012-Guadeloupe-2.pdf

 

« Gloug gloug gloug… Vous entendez ce bruit » ?
Germain pointe son doigt vers le bas de la maison. Le pilier de bois est totalement mangé par l’humidité, et de la vapeur s’échappe par des fissures venues du sol. Avec son ami Geoffroy, il se  souvient : « Ici quand on était gamin, c’était encore la mangrove, il n’y avait pas de maison, on allait chercher des crabes et des ouassous. On s’amusait à faire cuire les œufs sur les sources. On regardait l’eau qui bouillait. Et puis ils ont comblé ».
La mangrove a été recouverte, les maisons construites, mais la chaleur de la terre et les vapeurs d’eau remontent encore. En sous-sol, l’eau bout  entre 150 et 300°, ce qui n’a pas empêché la petite ville de s’agrandir au pied d’une seule centrale géothermique exploitée par Géothermie Bouillante, une filiale du BRGM et d’EDF.

Dès 1960, on s’est intéressé à cette source d’énergie gratuite, inépuisable et naturelle. Mais rien n’est simple et il a fallu de longues années de recherche pour tenter de trouver un modèle économique recevable. Elles ont nécessité des financements publics, du fait du coût de la réalisation de forages et du risque élevé lié aux incertitudes. Les opérateurs privés ne se risquent pas à financer la phase d'exploration, très onéreuse.

 

 

Les atouts de Bouillante
Pour avoir un bon réservoir géothermal, il faut une source de chaleur en profondeur, de l’eau qui s’infiltre, et pour que l’eau s’infiltre, des failles.
Sur l’île de Guadeloupe, ces trois conditions sont remplies.
On a longtemps cru que la chaleur de Bouillante venait de la Soufrière. En fait, le système qui l’alimente est un ensemble de petits édifices volcaniques qui ont entre 800.000 et 200.000 ans et transitent par trois grandes failles. Ils sont déjà largement refroidis. Rares sont les sites dans le monde, qui offrent à la fois cette puissance, une absence de risque éruptif et un moindre effet corrosif selon les chercheurs.
L’usine a été conçue en deux phases. En 1984, Bouillante 1 produisait 5MWe. Difficultés, arrêts, reprises. En 2000, reprennent des forages exploratoires qui conduiront à une nouvelle usine en 2005. Dès que Bouillante 2 a été mise en service produisant 15 MWe, le projet n’avait plus rien d’un prototype. Sur le site qui domine l’usine, trois forages sortent de terre une eau à 250°. L’eau est alors séparée de la vapeur qui, conduite aux turbines va produire de l’électricité, revendue à EDF qui la transporte vers Baie Mahaut et Pointe Noire. Récemment il  a fallu réévaluer les tarifs d’achat par EDF pour couvrir les frais d’exploitation.


Quelles retombées pour la petite ville ?
Même si les habitants ne sont pas toujours rassurés de sentir la terre bouillir sous leurs pieds, ici, c’est la seule industrie. Bouillante est une commune pauvre avec un taux de chômage avoisinant les 47%.
Même si elle n’emploie qu’une dizaine de salariés, la centrale fait rêver les élus, réveille en eux cette vieille idée du thermalisme. Au 18° le révérend père Dutertre emmenait déjà les malades de Vieux Habitants au bain dits du curé. Puis se furent les tuberculeux qui vinrent se faire soigner. A Thomas, une vasque naturelle a été aménagée. Régulièrement, les baigneurs viennent s’immerger dans un mélange d’eau de mer et d’eau thermale à 55°. Il est certain qu’aucun maire n’a encore pris la mesure de ce trésor.
Le projet d’extension et de construction de la troisième tranche réveille les conflits liés aux nuisances que supportent les habitants. http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/actualite/education-sante-environnement/geothermie-une-quete-d-informations-qui-peut-refroidir-202483.php
La baie est sublime, et de l’autre côté de la pointe lézard s’étendent les plus beaux fonds marins de la réserve Cousteau, célèbre d’ailleurs par ses sources chaudes sous marines qui plaisent tant aux tortues. Cette coexistence entre tourisme et production électrique n’est pas sans poser problème. Les protecteurs des îlets du pigeon voient d’un mauvais œil l’extension possible de Bouillante 3 sur la pointe Lézarde. Le renvoi des eaux chaudes à la mer pourrait être un coup dur pour les coraux, et les rejets de sulfure d’hydrogène sont une nuisance pour les riverains. Pourtant, le réservoir nord de la baie offre une potentialité de 30 MWe.

 

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