Environnement

mercredi, 29 août 2018 17:29

Gestion des requins à La Réunion, nage en eau trouble

Le requin bouledogue est la cause principale des attaques à La Réunion Le requin bouledogue est la cause principale des attaques à La Réunion

Le CRA, le Centre de Ressources et d’Appui sur le risque requin viens de mettre en ligne une carte des opérations de pêche en temps réel. Très vigilant sur le référencement des squales présent sur les côtes réunionnaise, le CRA a notamment révélé le 27 août dernier, la présence potentielle de requins aux abords de la Ravine Blanche près de Saint-Pierre. Ce lieu est un spot qui était très prisé des surfeurs avant la crise de 2011. Une « crise » plus institutionnelle que réelle qui est enflée par la surmédiatisation des attaques (1).

Depuis, surfeurs, pêcheurs, scientifiques et écologistes s’affrontent sur les mesures à prendre pour gérer la problématique requin. Des filets de protection ont été mis en place, la baignade a été interdite sur plusieurs sites (peu ou pas respectée), et des actions de prélèvement sont organisées. Régulièrement, le CRA effectue des pêches préventives censées protéger le rivage. Une action qui provoque la colère des collectifs contre la pêche des requins. Par ailleurs, ce centre mis en place en 2012 par la Préfecture de La Réunion, a déjà effectué plus de 80 marquages de requins (pose de balises entre autres) afin de mieux connaitre les habitudes de squales et ainsi mieux gérer les risques.

Presque une attaque sur deux est mortelle à La Réunion

Entre 2011 et aujourd’hui, La Réunion a subi 23 attaques de requins dont 9 mortelles. Par rapport au nombre d’attaques de squales dans le monde, le chiffre est faible. Là où l’île se distingue tragiquement, c’est par le taux très élevé de mortalité des attaques : presque 40 %. A titre de comparaison, la Floride a recensé 88 attaques de requins entre 2011 et 2014, et une seule a été mortelle. La grande majorité des attaques sont répertoriées dans la moitié ouest de l’île, dans des zones fortement peuplées (70 % des réunionnais résident dans la partie occidentale) et surtout ultra-touristiques. Par conséquent, il existe une forte exposition à une attaque. De plus, le constat est implacable, plus de la moitié des victimes sont des surfeurs ou des bodyboardeurs. Et les spots de glisse sont quasiment tous répertoriés dans cette zone géographique. A noter également que la plupart des attaques sont à mettre à l’actif des requins bouledogue.

Bilan des attaques de requins à La Réunion depuis la crise de 2011.

Le Bouledogue, une menace ?

Le requin bouledogue mesure entre 2m50 et 3m40 pour un poids d’environ 230 kg. Il s’agit d’un requin massif et lourd avec le museau court et aplati. Il est également appelé requin du Zambèze pour sa faculté à remonter les cours d’eau, ce qui en fait l’unique espèce à être capable de s’adapter aussi bien en eau douce qu’en eau saline. Par conséquent, il est fortement actif dans les eaux à forte turbidité, c’est-à-dire le taux de matière en suspension dans l’eau qui la rende trouble. Le requin bouledogue a un comportement agressif, solitaire et attaque sans sommation. Il est donc très difficile à voir.

Et c’est justement la rencontre entre son habitat naturel et son comportement qui provoque les accidents mortels à La Réunion. Enormément d’attaques ont été faites sur des surfeurs, pratiquant dans des zones d’eau troubles, en fin de journée. Et fatalement lorsque la visibilité dans l’eau n’est pas assurée, il est plus difficile de voir arriver le squale. A cela, il faut rajouter la visibilité hors de l’eau, donc surfer en fin de journée accroit les risques d’attaques. Autres conséquences de la forte présence de requins bouledogue sur les côtes réunionnaises, le réchauffement des océans, la pollution liée à la surpopulation des zones touristiques (eaux usées qui renforcent la turbidité, fréquentation accrue des zones de baignade, déversements de carcasses de mammifères dans la mer, etc.) ou encore la raréfaction de l’espèce.

Si depuis 2011, les accidents liés au bouledogue ont sensiblement augmenté, il est possible d’expliquer cela par la surpêche de ce requin. Le Carchanicus Leucas, de son nom scientifique est une espèce fortement menacée. Près de 100 millions de requins bouledogue sont tués chaque année selon l’Union Internationale pour le Conservation de la Nature (IUCN), notamment pour ses ailerons, son foie ou son cuir. Par ailleurs, la communauté scientifique souligne le rôle de régulateur naturel des océans, car ils sont au sommet de la chaine alimentaire.

Situation en Outre-mer

Les requins font partie du paysage ultra-marin. En Nouvelle-Calédonie, la situation est tout aussi préoccupante qu’à La Réunion. Sur les 46 attaques recensées depuis 1886, 15 ont été mortelles et 7 se sont passées après l’an 2000 (2). 

A contrario, la mer des Caraïbes est une mer relativement sûre. Pour preuve une seule attaque en Martinique a été enregistrée en 1954. Aucune enregistrée en Guadeloupe en 264 ans. Cela s’explique en partie grâce aux eaux limpides. En 2005 à Saint-Martin (partie hollandaise), une attaque est notée à Simpson Bay. Du côté de la Guyane rien à signaler et en Polynésie les requins sont bien présents, avec 92 attaques entre 1980 et 2015, mais aucune d’elles n’a été fatale. Pour cela, il faut remonter à 1893 à Rangiroa, un atoll des îles Tuamotu.

(1) : Entre 1988 et 2000, 22 attaques de requins ont été répertoriée à La Réunion. 13 ont été mortelles.

(2) : Source : Shark Attack Data

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