Taux de chômage des 15-24 ans
| Ceuta (Esp) | 65.80% |
| Réunion | 58.50% |
| Martinique | 56.80% |
| Andalousie | 54.40% |
| Guadeloupe | 53.20% |
Un visiteur qui arriverait d’une autre planète tirerait la conclusion, hors contexte, que le chômage est au sud et l’emploi au nord. La même étude réalisée sur des chiffres d’Eurostat nous dit en effet que le chômage des jeunes est le plus bas dans les régions de Tübingen, d’Oberbayern, de Fribourg, en Allemagne ou de Steiermark en Autriche, enfin d’Utrecht aux Pays-Bas.
L’Europe a lancé une véritable alerte pour cette « génération perdue ». En fonction des arrangements entre la Commission, le parlement et les gouvernements européens, elle votera (peut-être) une enveloppe de plus de 6 milliards d’euros pour soutenir l’activité dans les régions sinistrées et ramener le chômage des jeunes de 15-24 ans sous la barre des 20%. L’enveloppe d’intervention devrait être investie sur le terrain. C’est d’ailleurs ce que nous attendons tous, au delà des grandes proclamations généralistes sur la mobilisation contre le chômage. La Commission souhaiterait que les Etats proposent soit un stage, soit un emploi, soit encore une formation aux jeunes chômeurs. Les aides seraient fléchées vers les Régions. Cette question de la génération perdue présente un double danger pour nos régions d’Outremer : elle explique par exemple les récentes manifestations de jeunes à la Réunion pour réclamer des contrats aidés aux mairies. Que faire en effet, sans formation, sans emploi, à 20 ans, dans ces pays où la seule perspective est celle de petits boulots ou d’emplois aidés. On ne peut avoir 20 ans et désespérer de l’avenir. L’impact direct est ravageur. Les conséquences indirectes sont encore plus pernicieuses. Une génération perdue précède en général une génération sacrifiée. Les enfants chômeurs d’aujourd’hui seront des parents demain. Quelle perspective, quels messages transmettront ils à leurs enfants ? Les images d’un monde sans espoir, ou seul comptera l’échéance du revenu social ! Il faut agir vite et quitte à sacrifier une génération, autant la sacrifier pour bâtir avec elle un monde nouveau.
On peut être frappé par la cécité des responsables politiques. A tous les échelons, nationaux et locaux, ils gèrent ce compromis économique et social vieillissant, à bout de souffle, porté sur les fonds baptismaux au lendemain de la Deuxième Guerre Mondiale, pour compenser les ravages de l’histoire (surtout antillaise). Le monde de demain ne sera pas construit sur ces bases. J’ai déjà eu l’occasion de l’écrire sur ce site, une économie endogène doit être pensée et progressivement mise en œuvre. Une phase de 15 ans sera sans doute nécessaire pour passer d’un modèle à l’autre. Il faudra proposer un contrat de transition aux salariés, aux consommateurs aux dirigeants d’entreprise, aux élus locaux. Le modèle européen de consommation devra être progressivement substitué par un modèle adossé aux richesses locales et aux économies régionales. Pendant quelques années, il faudra renoncer à une partie du confort artificiel porté par le modèle actuel. A défaut, les revenus sociaux se réduiront et disparaitront. Dans des Etats en apnée financière, comme la France, la morphine de la subvention se tarira et la colère montera, faute de vraies perspectives de sortie de crise. La phase de transition devra compter sur des financements. Nous allons proposer des pistes de réflexion. Celle ci notamment que j’ai eu l’occasion de présenter récemment aux jeunes ultramarins et amis de l’Outremer de Science Po, réunis dans l’association Science O. Cette solution consisterait à séquestrer une partie de la sur rémunération des fonctionnaires (séquestrer ne veut pas dire confisquer mais immobiliser pendant un temps), pour abonder un fonds de retournement des économies locales. Je vous donne rendez-vous dans les prochains numéros de notre webzine pour présenter les détails de cette réflexion.




