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jeudi, 05 décembre 2013 08:28

Olivier OLLON « Mon enfance passée sur une île m'a formaté, et même façonné » Spécial

Écrit par Karina Quibon
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Quand il n'est pas surveillant de prison à Nanterre, il écrit. Olivier Ollon, originaire de la Martinique est poète depuis l'âge de 16 ans. De son parcours atypique, cet homme de 33 ans  a sorti son premier recueil de poésie " Sentiments Insondables" en janvier 2013 aux éditions l'Harmattan. Rencontre avec un personnage fascinant.



Outremerlemag : D'où vient cette passion pour l'écriture?
Olivier Ollon : Cette aventure a commencé alors que j’avais 16 ans. Je me suis mis à écrire sur une feuille de papier tout en gardant ce talent, jalousement, secrètement pour moi. Suite à quelques soucis sentimentaux, des chagrins d'amour, j'ai commencé à dialoguer avec la feuille comme avec un journal intime.

Outremerlemag : Vous avez commencé à écrire à l'âge de 16 ans, pourquoi avoir attendu 2013 avant de publier votre recueil ?
Olivier Ollon : Je n'ai pas attendu. Mais, je n'ai jamais cru qu'un jour j'aurai partagé ma passion avec d'autres personnes que celles de mon entourage. Au cours de mon parcours,  j’ai fait certaines activités, participé à des mouvements associatifs avec des jeunes.  Il fallait meubler la durée des spectacles, des interventions. On faisait des ateliers de poésie, de lecture. Des jeunes ont été amenés à lire ce que j'écrivais. C'est de cette façon que j'ai été découvert il y a 5 ans.

Outremerlemag : Que s'est t-il passé exactement ?
Olivier Ollon : Lors d'un événement festif dans la ville de Nanterre,  le 6 Avril 2009. Étant militant pour l'association « Jeunesse Ouvrière Chrétienne », certains jeunes venant de diverses villes, de Gennevilliers par exemple, ou encore de Colombes et Suresnes faisaient des représentations de danses Hip Hop,  de self défenses, de danse traditionnelles.  A cette occasion, j'ai fait lire mes poèmes par d'autres jeunes. Une  mère de famille présente lors de la manifestation a demandé le nom de l'auteur de ces poèmes. Elle a su que c'était moi.
Immédiatement intéressée par mon talent, la mère de famille m'a demandé si je souhaitais publier, éditer mes poèmes. Sur le coup, j'ai ri et cru à un canular. Elle était éditeur chez l’Harmattan. Six mois plus tard, l'Harmattan proposait d’éditer mon premier recueil de poésie.

Outremerlemag : D’où vient cette inspiration ?
Olivier Ollon : Il faut que je sois touché par un fait, un événement ou une action. Par exemple lorsque nous étions ensemble tout à l’heure, la rencontre d'enfants roumains nous demandant de l'argent m'a particulièrement touché. Ce  soir en rentrant je sais que je vais griffonner quelque chose, un poème dessus. Je vis cette passion comme un exutoire.
Lorsque j'écris c'est pour exprimer un malaise social, des inégalités, des difficultés, des injustices  que je vois autour de moi. L'impuissance qui se dégage de ce constat, que je ne peux rien n'y changer créer des émotions qui se manifestent dans mon envie d’écrire. A ce moment-là, on peut parler d'exutoire, de soulagement.

Outremerlemag : Que vous apportent vos poèmes sur le plan émotionnel ?
Olivier Ollon : Rien, car c'est moi qui les écris. C'est pourquoi j'ai autant de difficultés à les lire quelques fois en public. L'émotion que j'avais au départ disparaît puisque je la transcris en poème. Par contre humainement, cela  m'apporte beaucoup, surtout lorsque mes poèmes trouvent preneurs. Quand des personnes me parlent de mes œuvres, qu'elles me disent « je me suis vu dans tes écris ». Ça me donne du baume au cœur, de la motivation.

Outremerlemag : Aujourd’hui, la poésie n'est plus autant appréciée qu'autrefois ? Quelles en sont les raisons selon vous ?
Olivier Ollon : Tout à fait. J'ai eu la chance pour étayer ce que vous dites d'être reçu dans une école primaire en Martinique, les enfants ont appris « la gentillesse » un de mes poèmes pour la fête des mères. Dans un autre collège, c'est « sentiments insondables » qui a été enseigné. Une épopée dédicacée à ma mère et à toutes les mères de la terre. Tout pour vous dire que la poésie reste appréciable en école primaire.

Outremerlemag : Nombreux sont les poèmes qui, dans votre recueil, abordent le thème de l’amour. Est-ce un de vos sujets de prédilection ?
Olivier Ollon : J'ai été baigné dans un milieu, une source inépuisable d'amour depuis tout petit. Mes parents m'ont toujours inculqué les bonnes valeurs. Cette éducation a relativement impacté mes choix, mes désirs, ainsi que ma philosophie sur la vie en général. L'amour c'est un sourire, un geste, un morceau de pain qu'on donne à son prochain. C'est un cœur qui bat.

Outremerlemag : Vos origines martiniquaises vous ont t-elles influencées ?
Olivier Ollon : Bien sûr. Mes origines ont joué sur la balance. Elles ont largement influé sur les choix de mes poèmes. Dans deux des dix-huit poèmes, je fais une référence aux ancêtres. Dans mon prochain recueil, cela se ressentira davantage. Mon enfance passée sur une île m'a formaté, et même façonné.

Outremerlemag : Quels conseils donneriez-vous à de jeunes écrivains qui souhaitent percer dans la profession ?
Oliver Ollon : Je leur dirai de persévérer, d'avoir du courage, de ne jamais lâcher, de se battre pour ce en quoi ils croient. Un jour ou l'autre, la porte s'ouvrira. Pour ma part, au départ je n'avais pas pour objectif de publier un recueil. Par un concours de circonstances, je me suis fait connaître. La providence en a sûrement été pour quelque chose. J'ai  fréquenté les bonnes personnes au bon moment, au bon endroit. Si on s'engage dans un combat à un moment ça paie.

Outremerlemag : Vous avez réalisé la couverture de votre ouvrage. Pensez-vous un jour vous tourner vers cette autre passion qu'est l'illustration ?
Olivier Ollon : Étant plus jeune je dessinais souvent, j'avais aussi un certain don pour cette autre passion. D'ailleurs, je le cultive toujours. J’ai un peu abandonné au fil du temps mais j'ai toujours un bon petit coup de crayon. Un sens de l'observation très aigu. Par le passé,  j'ai réalisé des croquis symboliques. Je compte m'inscrire « au concours des pères de la négritude.

Outremerlemag : Avez-vous des travaux en cours ?
Olivier Ollon : Oui, un second recueil qui est presque terminé. Je le finaliserai en fonction des événements, avant la fin de l'année. Il sortira sûrement au 3ème trimestre 2014. J'aurai souhaité aussi sortir un roman, ça vaudra le détour. Pour l'instant, j'ai déjà les idées en tête. Il sera plutôt autobiographique sur un plan professionnel ou personnel ou même les deux, je verrai. Tout dépendra de mes inspirations et de mes envies. Une intervention littéraire dans un journal ou une tribune n'est pas à exclure. Chaque semaine, je donnerai rendez-vous au public par une petite histoire.



Les extraits placés dans un encadré : Du recueil « SENTIMENTS INSONDABLES » de Olivier Ollon éditées par les éditions l’Harmattan

ANCETRES (sur la Martinique)
Naître d'une terre inconnue de parents méconnus
Grandi sur une île à la douce et tropicale chaleur reconnue
Le fouet et la sueur plus souvent et unanimement retenus
Sur ces habitations de cannes, d'ananas, et de café plus qu'entretenus
Vous en fîtes des générations de descendants survenues
Tel un héritage d'efforts sans cesse effectué aujourd'hui disparu
Labeur détenu dans nos veiges nos gênes qui par delà l'océan sont venues
Enchaînées à fond de Galions et de Caravelles, sans aucune prévenance connue.
Dominant l'oppression rejetant l'affliction à la libération nous sommes parvenus
Du mélange et de croisement le métissage est apparu
Créant une  nouvelle couleur explosant à la vue
Du monde qui ne s'empressa guère  de lui souhaiter la bienvenue

POURQUOI AIMER
Quand je vois  mon amour, des coups  de tambour parcourent mon cœur.
Quand je sais qu'elle est là, des larmes dévalent  les courbes de mes joues.
Et alors, dès cet instant précis, je réalise qu'elle ne m'appartient pas.
Elle n'est certainement pas ma chose, encore moins mon esclave.
Pourtant, pour elle je donnerais ma vie, mon âme, en échange de son bonheur.
Pourquoi l'amour cause t-il tant de souffrances et de bien-être simultanément.
C'est tellement beau, passionnant, difficile, et revigorant d'aimer une femme pour un jour, voire toujours.

Lu 7782 fois Dernière modification le jeudi, 05 décembre 2013 09:04