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vendredi, 02 août 2013 11:22

Jacques Martial : « J’aime les beaux rôles »

Écrit par Willy GASSION- Journaliste
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Jacques Martial est comédien. Après avoir joué dans Navarro pendant plus d’une décennie, il tient depuis 2006 un nouveau rôle. Celui de président de l’Etablissement public du  Parc et de la Grande Halle de la villette.

Jacques Martial est dans son bureau. Celui de ses fonctions de président. Il enferme dehors la chaleur incandescente de l’été. Les bruits aussi. Il met en marche le ventilateur puis délimite sur une vaste table blanche, qui semble être une table de travail, un espace comme si il allait s’y poser. Il tire une chaise et s’assoit. Qui du comédien ou du président nous reçoit ? « J’aime beaucoup le théâtre, je continue à en faire sur mon temps de vacances. Je continue de jouer Cahier d’un retour au pays natal qui est une œuvre majeure dans l’histoire de ma vie, ça me nourrit, ça me remplit. Jouer permet de rester en contact avec le réel, de se confronter à la difficulté de la création et d’avoir beaucoup de plaisir ». La créativité et la réalité d’artiste de Jacques Martial même ici restent intactes. Jacques Martial n’a donc jamais cessé d’être ce qu’il est entièrement et ce qu’il a sans doute toujours été. Un artiste « ça a toujours été mon désir, je n’ai jamais voulu rien faire d’autre. J’ai toujours eu le désir de la scène, de la représentation », confesse t’il. Et c’est tout l’imaginaire de Jacques Martial qui dès l’enfance semble dédié malgré lui à ce désir de scène. Un désir irrépressible auquel  il s’est soumis : « mon désir, mon goût, mes rêves, mes jeux étaient toujours dirigés vers la scène ».  Un artiste donc mais pas encore un comédien. « Je pensais au début que je ferais de la danse ou du chant mais les circonstances ont fait que je n’ai pas pu apprendre la musique que je souhaitais et comme je le souhaitais. Je voulais faire de la musique classique, j’avais douze ans et j’arrivais en Guyane où il n’y avait pas de professeur de piano ».

Ce ne seront donc ni le chant ni la danse mais le théâtre. Pas par défaut comme on pourrait le croire. Le désir de théâtre de Jacques Martial est enfoui en lui depuis longtemps, depuis l’enfance. Autant dire depuis toujours. Encore en sommeil. Le théâtre qui ne le démange pas encore mais le théâtre qui est là tout de même et qui s’est révélé à lui. En deux temps. Un choc « esthétique » à chaque fois. D’abord « Les Perses d’Eschyle, c’était à la télévision un soir, je devais avoir 5 ou 6 ans, c’était un choc émotionnel extrêmement puissant et déterminant ». Ensuite, « toujours à la télévision, la diffusion de La mégère apprivoisée de Shakespeare avec Bernard Noël  et Rosy Varte. Et ça a été le deuxième choc qui a confirmé le premier ».

Jacques Martial, comédien parle posément. Sans aucune hésitation en veillant toujours à ne pas se confier. Les mots viennent facilement, choisis, précis et quelque fois acérés. Sans doute par habitude, la proximité de l’acteur avec les mots, le texte. La complicité qui les lie. Presque une forme de promiscuité. « Le théâtre, c’est cette chose étonnante qui raconte l’expérience humaine. C’est une fenêtre soudain qui s’ouvre, selon moi, sur l’humain. Qu’est-ce que l’être humain dans sa psyché, dans sa complexité, dans ses tourments, dans sa capacité à être immense ou à être mesquin. Ça raconte l’âme humaine, l’essence humaine. Dans le jeu d’acteur, il y a quelque chose d’immédiat beaucoup plus proche du réel et en même temps il y a cette nécessité d’extension pour arriver au jeu, à la représentation de ce que l’on est censé interpréter ».

Le président n’est pas en reste. Avec d’autres mots mais toujours avec la même rigueur et la même précision. « Ma fonction ici est de présider un établissement public extraordinaire qui a une vocation sociale, politique et esthétique unique dans le paysage culturel français et sans doute européen. C’est une chance incroyable dans la vie d’un individu et dans la vie d’un artiste aussi d’être en responsabilité d’un établissement de cette dimension ». Le propos devient  politique. Etre acteur, serait-ce aussi être politique ? Il semble que oui.  Jacques Martial est ancré dans le réel de la cité et derrière ses autres-mots, on voit poindre son engagement.
« Le projet de la Villette est tout à fait singulier. Nous sommes géographiquement  à l’est de Paris, nous sommes dans un des endroits les plus pauvres de l’Ile de France.  Le 19ème arrondissement est un des arrondissements les plus pauvres de Paris, le nombre de personnes issues de l’immigration est sans commune mesure avec la moyenne parisienne et francilienne, il y a donc là un brassage humain, social, culturel tout à fait unique. Un des enjeux essentiels de la Villette est celui du vivre ensemble. La Villette est le lieu du vivre ensemble et de la culture. C’est à la fois un territoire et un laboratoire unique. Laboratoire de création, du vivre ensemble et de la démocratisation de la culture. Et c’est pour cela que je me sens tout à fait à ma place ici. Le projet que j’ai présenté s’appelle les Périphériques et il parle de la mixité sociale, de la démocratisation de la culture et de l’accès à la culture. » Le public, tous les publics et en particulier le public de proximité ; celui de l’arrondissement est au centre de la politique culturelle initiée par Jacques Martial à la Villette. Son propos est de « poser la radicalisation de la question du public comme étant prioritaire » mais aussi de « mettre en relation des œuvres avec le public » grâce à l’ « accompagnement », la pédagogie et la gratuité de certaines expositions.

Pendant tout l’été et jusqu’au 28 août, La villette propose le Cinéma en plein air. Projection gratuite de films accessibles au public déficient visuel. Du mercredi au dimanche.
Renseignements : villette.com -  Parc de la Villette : 211 avenue Jean Jaurès, Paris 19ème. Métro : Porte de Pantin ou Porte de la Villette. Bus lignes : 75 et 151

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